PROGRAMME IMPACT

How German Publishers Drove Reader Revenue During the COVID-19 Crisis

3 juillet 2020

Face à la crise du COVID-19, les organes de presse allemands se sont trouvés face à la nécessité de relayer des actualités plus essentielles que jamais dans des conditions de travail particulièrement difficiles, marquées par d’importants changements sur le plan professionnel et par une réduction des effectifs.
« Notre principal problème a été l’annulation de nos placements publicitaires, aussi bien au format papier qu’au format électronique », explique Frank Unkelbach, directeur de la gestion digitale chez Main Echo. « Pour faire revenir nos clients, nous avons proposé des remises à durée limitée allant jusqu’à 50 %, avec pour mot d’ordre "Gérons la crise ensemble", une façon de souligner que cette initiative nous profitait autant à nous qu’à nos partenaires. Jusqu’ici nous sommes satisfaits des résultats et nous voyons que nos clients apprécient cette approche. »
Parallèlement, cette chute des revenus publicitaires a correspondu à une hausse du soutien de la part des lecteurs, dans des proportions allant parfois jusqu’à 300 % par rapport à la période pré-coronavirus.
« Comme la plupart des éditeurs, nous avons eu des difficultés en raison de la baisse des revenus publicitaires pendant la crise », relate le Dr Ruth Betz, directrice de la transformation digitale chez Funke Mediengruppe. « D’un autre côté, si l’on compare la situation 60 jours avant [la propagation du COVID-19] à celle 60 jours après, au moment où [le virus avait le plus de répercussions en Allemagne], le nombre de nos nouveaux abonnés quotidiens a augmenté de 60 % et les taux d’abandon ont considérablement baissé. Nous avons ainsi enregistré une hausse nette de 160 % de notre nombre d’abonnés pendant cette période. »
Dans un contexte où les organes de presse du monde entier continuent de développer et de faire évoluer leur approche en matière de revenus apportés par les lecteurs, cet article présente les stratégies adoptées par 14 agences de presse germanophones participant au programme Reader Revenue Accelerator du Facebook Journalism Project. Nous espérons qu’elles seront utiles à d’autres organes de presse.
Les projets des 14 éditeurs subventionnés par le programme Accelerator ont généré plus de 7,4 millions d’euros en valeur globale, avec notamment plus de 35 000 nouveaux abonnés et plus de 125 000 abonnés aux newsletters et inscriptions sur les sites web des agences, d’après une analyse des rapports de subvention des éditeurs envoyés à notre partenaire Accelerator, l’International Center for Journalists. Ces résultats ont été observés bien avant le début de la pandémie de COVID-19 (nous expliquerons en détail la structure du programme Accelerator et de ces subventions dans la conclusion de cet article).
Les éditeurs ont employé des stratégies mises au point dans le cadre du programme Accelerator afin de s’adapter à la réalité liée au COVID-19 et de définir leurs plans pour l’avenir. Voici comment certains éditeurs décrivent leur travail, dans l’optique de permettre à d’autres organismes de presse d’en tirer des enseignements.
Renforcez votre impact à l’aide d’équipes transversales
La crise du coronavirus a frappé tous les médias allemands à tous les niveaux, les obligeant à modifier leurs processus éditoriaux et leurs priorités en matière de couverture de l’actualité, ainsi qu’à élaborer des plans marketing en urgence. Les éditeurs qui ont pu rapidement faire croître leurs abonnements se sont appuyés sur des équipes rassemblant tous les domaines de compétences de l’entreprise (rédaction, analyse, marketing, produits et médias sociaux) en un tout cohérent.
« Le programme Accelerator a changé notre état d’esprit et notre manière de collaborer. À ce jour, les membres de notre groupe Accelerator continuent de communiquer et de coopérer comme ils le faisaient pendant le programme », assure Ruth Betz de Funke Mediengruppe.
Même avant le COVID-19, Funke a mis en pratique les leçons du programme Accelerator et a ainsi recueilli 27 000 nouveaux abonnés payants de plus que son objectif budgétisé, en rassemblant une équipe dédiée à une mission simple : effectuer d’innombrables tests afin de faire augmenter le nombre de nouveaux abonnés quotidiens. La réussite de Funke, que nous étudierons plus en détail, montre que les équipes transversales peuvent réellement faire la différence.
D’autres organes de presse ayant participé au programme Accelerator abondent dans ce sens.
« Il est nécessaire de supprimer les cloisonnements. C’est pourquoi nous avons mis en place un groupe de travail interservice. Depuis, il est devenu parfaitement naturel de travailler sur plusieurs fronts à la fois », confie Thomas Webel, directeur digital chez Oberpfalz Medien.
Au cours du programme Accelerator, chaque éditeur participant s’est réuni une heure toutes les semaines avec une équipe transversale et un coach. Et de nombreuses équipes continuent de se voir et de collaborer sans les coachs depuis la fin du programme. En vue de promouvoir cette coopération interdisciplinaire au sein de structures qui sont encore généralement très influencées par les traditions, il est utile de définir des objectifs clairs, de communiquer avec précision les ajustements apportés à ceux-ci et de proposer des compensations associées à la réalisation de ces objectifs.
Les objectifs interservices ont également été un moteur clé de la collaboration au sein de Nürnberger Nachrichten. « Nous sommes fiers du fait que de plus en plus de collègues (de tous nos services) participent à notre cheminement vers une stratégie d’abonnement digitale performante », se réjouit Barbara Zinecker, directrice du développement de l’audience chez Nürnberger Nachrichten.
Partez de ce que vous avez et mettez en place des changements (promptement !)
Ayant déjà collaboré régulièrement auparavant, les membres d’équipes transversales passent bien plus rapidement à l’action, comme ils l’ont fait en mars, lorsque la pandémie de COVID-19 a touché l’Allemagne.
« Il vaut mieux commencer avec ce que vous avez », conseille Barbara Zinecker de Nürnberger Nachrichten. « Dans le cadre du programme Accelerator, nous avons appris à accorder moins d’importance à ce qui nous fait défaut pour nous concentrer pleinement sur nos possibilités. »
Barbara Zinecker ajoute que c’est ce type de collaboration qui a permis à leurs collègues Accelerator de Nuremberg d’enregistrer des ventes concrètes. La rédaction et le service des ventes ont réagi sans tarder et travaillé main dans la main pour que les offres d’abonnement au Nürnberger Nachrichten (formats papier et électronique) fassent l’objet d’une publicité bien visible, dans le contexte d’articles traitant du coronavirus. « Cela nous a permis d’obtenir une hausse de 20 à 30 % des abonnements à nos produits payants, ainsi qu’une réduction de 10 % du taux d’abandon », explique la directrice du développement de l’audience.
La collaboration transversale a également permis aux éditeurs de lancer de nouvelles initiatives éditoriales, avec pour but d’accroître leur audience fidèle.
« Nous réfléchissons davantage du point de vue du client. De quoi a-t-il besoin de notre part ? Lors de la crise, nos journalistes se sont habitués à de nouveaux formats tels que les podcasts et les vidéos », explique Lena Beneke, éditrice chez Ruhr Nachrichten (Lensing Media). « La production de ce genre de contenu a considérablement augmenté et nos lecteurs semblent l’apprécier. »
Pensez à l’étape suivante pour votre audience
Voici une habitude que les éditeurs ayant participé à Accelerator s’habituent à développer : inciter les lecteurs à franchir une simple étape supplémentaire dans leur relation avec une agence de presse. L’idée est d’adopter une « stratégie de l’étape +1 », selon l’approche enseignée par Yasmin Namini, coach et responsable de programme Accelerator. Dans cette approche, les éditeurs réfléchissent en permanence à faire en sorte que les lecteurs nouent une relation plus étroite avec leur marque, via la recommandation de contenu, les inscriptions aux communications par e-mail, les invitations à s’enregistrer et, en fin de compte, les offres d’abonnement.
« La stratégie de l’étape +1 nous a semblé si logique que nous l’avons rapidement partagée avec tous nos collègues. Nous avons fractionné l’approche étape par étape et les points d’action pour tous les services, y compris dans le cadre du lancement de nos newsletters », explique Ruth Betz de Funke.
« Transformer les lecteurs occasionnels en lecteurs fidèles et conserver nos abonnés sont deux axes sur lesquels nous essayons de travailler en ce moment » dit quant à elle Julia Morein, responsable des abonnements chez Rheinische Post.
Quelle quantité de contenu en libre accès (auquel un lecteur peut accéder sans payer) est suffisante pour inciter un utilisateur à s’abonner, mais pas excessive au point de lui faire croire qu’il peut lire gratuitement tout ce qu’il veut ? C’est la limite avec laquelle les éditeurs composent pour comprendre comment convertir les lecteurs réguliers en utilisateurs inscrits ou payants. Dans ces stratégies, il n’existe pas de règle absolue concernant le contenu à rendre accessible uniquement en abonnement payant. Les éditeurs qui ont observé les meilleurs retours ont ajusté sans cesse leur approche jusqu’à trouver l’équilibre le mieux adapté à leur marque et à leur marché (ce qui ne les empêche pas de poursuivre leur suivi et leurs tests).
Par ailleurs, le contenu qui ramène des abonnés payants surprend souvent, fait remarquer le Dr Christoph Rybarczyk, vice-directeur du service web chez Hamburger Abendblatt. Même si l’on s’appuie sur des indicateurs pointus, il peut s’agir un jour d’une alerte Info et le lendemain d’informations financières.
Néanmoins, une analyse suivie des contenus qui génèrent le plus de conversions peut contribuer à guider vos choix éditoriaux et vos initiatives marketing.
« Il ne nous semble pas judicieux d’essayer de sélectionner les articles à rendre payants dans une masse d’articles déjà rédigés voire déjà publiés. La rédaction doit faire ce choix au moment de planifier les articles, avant d’y consacrer des ressources (journalistes, moyens vidéo, etc.) », estime Kai Gohlke, rédacteur en chef adjoint chez Oberpfalz Medien.
« En nous fondant sur l’expérience d’autres éditeurs (principalement ceux qui ont participé au programme Accelerator), nous avons défini des critères pour identifier les articles à valeur ajoutée, critères que nous comparons régulièrement à nos propres KPI », précise Kai Gohlke. « Nous nous assurons que chaque journaliste de la rédaction connaît ces critères et ajoute un tag spécial aux articles correspondants. Quand une personne n’est pas sûre si un article correspond à ces critères, elle peut le publier dans un canal Slack dédié, où nous en discutons. »
Cette approche plus structurée à l’égard du contenu verrouillé porte ses fruits : Der neue Tag, d’Oberpfalz Medien, a triplé le nombre de lecteurs connus, à savoir ceux abonnés à la newsletter et inscrits sur le site web, qui est passé à 30 000 en quelques semaines selon Thomas Webel, directeur du service web à Der neue Tag.
Les newsletters jouent un rôle particulièrement crucial dans le développement de l’audience
Plusieurs semaines avant l’apparition du COVID-19, Der neue Tag a adopté des recommandations en matière d’e-mail issues du programme Accelerator, et a lancé deux newsletters. Quand la pandémie a frappé, le journal a créé une newsletter supplémentaire centrée sur le coronavirus.
« Nous avons ainsi recueilli près de 4 000 abonnés supplémentaires à notre newsletter en quelques semaines seulement », raconte Thomas Webel d’Oberpfalz.
L’équipe travaille désormais sur un concept visant à transformer cette réussite ponctuelle en un produit durable. Der neue Tag estime également que les lecteurs récemment inscrits à la newsletter sont fortement susceptibles de devenir des abonnés payants, et c’est aussi l’hypothèse qu’entretient l’équipe du Nürnberger Nachrichten. Une hypothèse d’ores et déjà confirmée par Funke. Après seulement quelques mois, l’entreprise propose bien plus de 20 newsletters (par titre, sujet et régions, ainsi qu’une newsletter spécial COVID), dont les destinataires sont bien plus susceptibles de souscrire ensuite un abonnement que les autres utilisateurs des portails. L’équipe espère aussi obtenir un taux d’abandon plus bas auprès de ce groupe d’utilisateurs, bien qu’il soit encore trop tôt pour recueillir des données à ce propos.
« Nous avons formé une unité interdisciplinaire pour passer à la vitesse supérieure sur le plan des newsletters de l’entreprise. En raison de son succès immédiat, deux nouveaux membres ont rapidement rejoint l’équipe à temps plein », détaille Ruth Betz.
Ne craignez pas de tester les tarifs de façon créative également
Lors de la première phase de la crise du COVID-19, Main Echo et Straubinger Tagblatt (parmi d’autres éditeurs du monde entier) ont tous deux décidé de rendre leur contenu gratuitement accessible, mais de manières subtilement différentes.
Chez Straubinger, la mise à disposition de tout le contenu moyennant une simple inscription sur le site web a attiré plus de 11 000 nouveaux inscrits, formant un nouveau lectorat cible pour les futures initiatives de promotion des abonnements.
« Nous avons estimé que des circonstances particulières exigeaient de prendre des mesures tout aussi particulières. Nous avons donc rendu notre contenu premium disponible pour tout le monde après inscription », commente Andreas Seidl, éditeur en chef de l’organisme de presse. La croissance de Straubinger au plus fort de la pandémie de COVID-19 s’est appuyée sur une hausse stable des inscriptions en 2019. À la fin du deuxième trimestre 2020, plus de 38 000 personnes s’étaient inscrites à l’offre premium idowa.plus de l’éditeur, selon Andreas Seidl.
Dans le cas de Main Echo, une offre spéciale gratuite de six semaines a attiré plus de 500 nouveaux abonnés, un chiffre presque égal à celui enregistré sur les deux dernières années.
« Nous sommes très contents de voir que nos abonnés sont bien moins susceptibles de partir que ce que nous pensions », se réjouit Frank Unkelbach, directeur de la gestion digitale chez Main Echo. « Après le premier mois de paiement nous observons encore un taux de rétention très correct, qui nous amène à penser que nous pouvons espérer retenir 50 % de ces abonnés payants de façon permanente. Nous pouvons en outre prévoir une croissance stable de nos abonnements payants habituels, à un niveau bien plus élevé que l’an passé. »
Et maintenant ? Comment garder tous ces nouveaux abonnés ?
Des éditeurs de tous pays, y compris ceux cités ci-dessus, se focalisent d’ores et déjà sur la façon de conserver leurs nouveaux lecteurs payants bien après la fin de la crise. Nous présentons ici une analyse approfondie des stratégies de rétention des éditeurs ayant participé au programme Accelerator.
À propos du programme Reader Revenue Accelerator
Pendant l’année 2019, 14 éditeurs nationaux et régionaux germanophones ont participé au programme Reader Revenue Accelerator.
Ils représentaient plusieurs régions allemandes et une région autrichienne, avec des tirages payants dont le nombre variait entre moins de 50 000 et plus de 250 000. Il s’agissait (dans l’ordre alphabétique) de : Augsburger Allgemeine, Der neue Tag, DuMont, Frankfurter Rundschau, Funke (Hamburger Abendblatt and WAZ), InFranken, Ruhr Nachrichten, Main-Echo, Main-Post, Nürnberger Nachrichten, Rheinische Post, Ruhr Nachrichten, Straubinger Tagblatt et Stuttgarter Zeitung.
Le programme comprenait trois mois de formation intensive, dont trois réunions en présentiel, des sessions de travail individuelles avec des coachs dédiés et des discussions en ligne.
Chaque organisme de presse a reçu une subvention de 50 000 € pour appliquer les enseignements tirés du programme. Les bourses étaient financées par le Facebook Journalism Project et administrées par l’International Center for Journalists, qui s’est associé à Facebook pour l’organisation du programme.
La programmation et le coaching du programme sont menés par Tim Griggs, consultant et conseiller indépendant, et ancien dirigeant du New York Times et du Texas Tribune. Le programme Accelerator d’Allemagne a été dirigé par Yasmin Namini, consultante médias digitaux, et ancienne directrice chargée de la clientèle et vice-présidente du New York Times. Les coachs étaient Ray Pearce, consultant en médias d’actualités digitales, et Lynne Brennen, responsable marketing et partenaires de Red Root Marketing.
Une grande partie des actions mises en place par les éditeurs face à la pandémie de coronavirus se fondaient sur les progrès réalisés au cours du programme Accelerator lui-même. Pendant le programme, ce groupe d’éditeurs ont fait progresser leur entreprise grâce à un mélange de coaching individuel, de réunions en présentiel et de partage entre pairs. À la fin du programme, tous les éditeurs ont reçu une subvention pour mettre en pratique leurs connaissances.
Ils se sont à nouveau rassemblés, cette fois virtuellement, les 23 et 24 juin pour partager les enseignements tirés de leur programme de subvention et de leur expérience liée au COVID-19. Lors de cette session virtuelle, les coaches Accelerator ont apporté des informations complémentaires sur l’utilisation des statistiques, le développement de produits et le marketing.
Si vous souhaitez contacter l’un des éditeurs mentionnés dans cet article ou si vous avez des questions, n’hésitez pas à envoyer un e-mail à Accelerator@FB.com. Nous serons ravis de vous mettre en contact avec d’autres personnes qui travaillent dur pour assurer l’avenir du journalisme local.
Résultats fournis par les éditeurs.


Le programme Accelerator
Le programme Accelerator du Facebook Journalism Project aide les nouveaux éditeurs de presse à créer des entreprises pérennes. Fondé et organisé par le Journalism Project de Facebook (FJP), chaque programme Accelerator comprend trois mois d’ateliers pratiques animés par des professionnels aguerris des médias, des subventions administrées par des organisations de journalisme à but non lucratif et des rapports réguliers sur les recommandations du secteur. Le directeur exécutif du programme est Tim Griggs, consultant / conseiller indépendant, et ancien dirigeant du New York Times et du Texas Tribune.

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